Sortie 7 septembre 2022 - Drame / France - 1H45
Réalisé par Alice Winocour Avec Virginie Efira / Benoit Magimel / Grégoire Colin / Maya Sansa
A l’opposé d’Hollywood et des Américains, le cinéma français prend souvent le temps de revenir sur les blessures de son histoire comme si une respiration était nécessaire afin d’accoucher d’œuvres intègres et de trouver le bon geste artistique pour raconter l’irracontable. Inspiré librement des attentats de Paris, Alice Winocour, réalisatrice de l'excellent Proxima, touche juste et en plein cœur. Elle revient sur un tragique incident, qui offre un instant de résilience émouvant et nécessaire. Son frère a miraculeusement survécu à l’assaut sur le Bataclan. Le film est très différent d’Amanda de Mickael Hers qui était une fiction sur le thème du deuil et du passage de l'enfance à l'âge adulte, avec une attaque terroriste en toile de fond.
D’abord une scène effrayante, la reconstitution sans aucune atténuation ni occultation de ce qu’est une fusillade dans un lieu clos. La scène est subite, très crue, sanglante et d'un réalisme affolant avec un très gros travail sur le son. C’est glaçant.
Filmé avec énormément de précautions et de pudeur, la réalisatrice se focalise sur les victimes et leur mémoire mais elle n'en oublie pas les victimes collatérales, les proches et familles qui sont finalement tout aussi perdus. Winocour nous montre les dommages sur une seule personne, une seule vie. Une petite histoire qui s'inscrit dans la grande. Ce que cherche à nous montrer la réalisatrice est la force du lien créé par une expérience commune hors du commun, la difficulté de sortir d'un traumatisme ineffable, le mutisme qui va de pair avec l'effet de sidération, la reprise progressive d'un parcours de vie bousculé par les circonstances. Winocour a réussi à faire ressentir le trauma mieux qu'un documentaire n'eut pu le faire comprendre.
Mia est à la recherche de réponses aux questions très diverses qui permettent de se reconstruire. Chaque fragment de souvenirs que Mia récupérera est un pas de plus vers le repos. Tout son passé va couler. Il lui faut renaître en retrouvant celui qui a partagé l'instant entre sa mort et la vie en lui tenant la main.... Les plans fixes alternent avec les mouvements en caméra-épaule ; les gros plans sur les corps - et en particulier les mains - rapprochent les protagonistes, montrent l'aspect à la fois charnel et psychique de cette reconstruction.
Virginie Efira est au sommet de son art. Elle donne une autre facette de son talent, par une force et une ténacité dans la recherche de la vérité. Elle devient la favorite pour le César de la meilleure actrice. Benoit Magimel trouve une nouvelle occasion de démontrer que cette deuxième partie de sa carrière le positionne comme l'un des comédiens incontournables du cinéma français. Nastya Golubeva Carax est la révélation du film. Elle y est très touchante.
Après les attaques et les vies brisées, Winocour raconte avec Efira le besoin de penser pour panser, dans une émouvante retenue.
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